L’American Field Service et la Réserve Mallet

Dès les premiers mois de la Première Guerre mondiale, des comités américains se formèrent pour encourager les jeunes américains à venir soutenir la mobilisation américaine en France et s’engager dans des missions humanitaires, principalement pour porter assistance aux blessés. Les premières unités d’ambulances furent créées près du front et formèrent l’American Ambulance Field Service ou Service aux Armées de l’Ambulance Américaine en avril 1915 par A. Piatt Andrew.

Trente-trois sections sanitaires (SSU) de l’AFS furent détachées auprès de l’Armée Française sur tous les théâtres d’opérations en France et dans l’Armée d’Orient.

Après l’entrée en guerre des États-Unis en avril 1917 et lorsque les régiments américains devinrent opérationnels fin 1917, début 1918, les SSU passèrent sous l’autorité de l’Armée américaine tout en demeurant détachés auprès de l’Armée Française. A l’initiative du Haut Commandement Français, fut alors organisée la Réserve Mallet, service de transports de camions militaires français, conduits par des bénévoles américains.

La réserve Mallet fut ainsi nommée parce que sous les ordres du capitaine de cavalerie Mallet et parce qu’elle n’était attachée à aucun corps d’armée, mais maintenue en réserve pour le service de transport d’urgence.

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Grand Cahet de la RESERVE MALLET / CENTRE AMERICAIN
Trésor et Postes 89, 17 août 1917, Section TM 537, Convois automobiles par le BCM de Paris pour Peoria, Illinois

Bloom, l’expéditeur de la lettre fut l’un des douze premiers ambulanciers américains.

Nota : une section TM est généralement composée d’une voiture légère, de vingt camions, d’un camion-atelier et d’une motocyclette.

Chronologie simplifiée de la réserve Mallet

  • 8 mai 1917 première section de transport à rejoindre le front
  • 1 octobre 1917 sections de transport prises en charge par l’armée américaine
  • 28 octobre 1917 bataille de Malmaison sur le Chemin des Dames
  • 21 novembre 1917 convoi à Montdidier en soutien de l’offensive britannique sur Cambrai
  • 25 mars 1918 retraite du siège de Soissons
  • 29 mai 1918 retraite de Chavigny
  • 19 octobre 1918 engagement dans la bataille de Champagne
  • 11 novembre 1918 armistice
  • 28 novembre 1918 départ du commandant Mallet
  • Courant 1919 (avril ?), retour aux Etats Unis

Voir : Armées américaines en France

Armée du Rhin et occupation de la Rhénanie et de la Ruhr

L’occupation alliée de la Rhénanie a eu lieu à la suite de l’armistice qui mit fin aux combats de la Première Guerre mondiale le 11 novembre 1918. Les armées d’occupation se composaient des forces américaines, belges, britanniques et françaises. Cette occupation fut confirmée par le traité de Versailles. Élaboré au cours de la conférence de la paix de Paris, le traité fut adopté le 28 juin 1919 et promulgué le 10 janvier 1920. Il prévoyait une présence militaire des Français, des Britanniques, des Américains et des Belges sur la rive gauche du Rhin et une partie de la rive droite pour une période de cinq à quinze ans suivant les territoires. Les Français reçurent à la fois la plus grande des zones d’occupation qui s’agrandit encore avec le retrait rapide des États-Unis en janvier 1923 ainsi que la direction de la Haute Commission Interalliée aux Territoires Rhénans (HCITR), la présidence de la commission de gouvernement de la Sarre mandatée par la Société des Nations ainsi que celle de Memel (entre le 15 février 1920 et avril 1923) et de la haute Silésie (missions de maintien de la paix en compagnie de troupes alliées en Haute Silésie entre 1920 et 1922).

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La Commission interalliée des territoires rhénans avait été créée après l’Armistice de 1918, fut remplacée par une Haute Commission interalliée des territoires rhénans le 10 juin 1920 (paragraphes 428-431 du traité de Versailles). C’était un corps d’administration militaire et économique des territoires occupés de Rhénanie qui siégea à Luxembourg, puis à Coblence avec des délégations à Mayence, Wiesbaden, Trèves, Bonn et Speyer.

Voir notre page spéciale sur l’occupation de la Rhénanie et de la Ruhr

 

 

Présence française en Albanie, 1916 – 1920 (Korytza – Pogradec)

La République de Korytsa, (Korça, Kortcha ou Korytza, voire Koritza) est une région autonome mise en place par la France dans le district de l’actuelle Korçë, dans le sud de l’Albanie, durant la Première Guerre mondiale.

Création de la République de Korytsa

L’offensive décisive sur le front d’Orient de septembre 1918 ne fut pas que le fruit d’une œuvre militaire. Elle fut aussi le résultat d’un travail politique de près de deux ans qui mena à l’occupation de Corfou avec reconstitution de l’armée Serbe, à la création du camp de Salonique, véritable centre décisionnel de la Grèce d’alors et à la création d’une éphémère république de Korytza.

Dans la partie sud-est de l’Albanie, la ville de Korça (les Français utilisaient le nom grec de Korytza) était occupée par les Grecs qui exerçaient l’administration depuis octobre 1914. Or cette zone n’était pas convoitée par les Serbes comme pouvait l’être le nord mais par les italiens qui étaient déjà maîtres du sud-ouest de l’Albanie, et cherchaient à s’accaparer le sud-est. Par ailleurs, la Grèce n’étant alors pas en guerre hésitait entre une politique germanophile menée par le roi Constantin et une alliance avec l’Entente, représentée par l’ancien premier ministre Venizelos.

Le général Sarrail qui dirigeait l’Armée d’Orient ne voulait pas que la politique des puissances régionales interfère avec la logique militaire. À l’automne 1916, il « s’inquiéta de ce qui constituait son flanc gauche, qui ne formait pas véritablement un front, mais où des troubles opposaient les venizélistes à des bandes et à une grande partie de la population de Korçë et de ses environs » (Augris op cit). Voulant préparer l’action dans la zone de Monastir située 100 km de Korça, il avait aussi besoin de contrôler cette zone. En y envoyant un détachement français, il ôtait aux royalistes grecs un contact avec les puissances centrales, aux autres grecs un terrain de propagande, aux italiens, enfin, la possibilité d’établir leur pouvoir durablement sur toute la région.

Carte : Région de Korçë.

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En rose, le territoire de la République, dont au nord, le territoire de Pogradec. Les trois seuls bureaux de poste existants à l’époque sont indiqués en jaune. Les flèches tiretées vertes montrent les manœuvres militaires vers l’objectif de Monastir.

A cette fin, il dépêcha le colonel Descoins. Celui-ci dirigeait la mission française, composée d’un bataillon du 242e d’infanterie, remplacé à la fin de décembre par le 13e bataillon territorial d’infanterie, du 2e bataillon de marche indochinois ; de deux escadrons de chasseurs d’Afrique ; d’une section d’artillerie. Il arriva à Korça le 21 novembre 1916. Se référant à ses seuls ordres militaires, il crut avoir les mains libres et pensa alors établir une « administration indigène sous le contrôle français » (Descoins, Rapport sur la situation de Korytza du 23 novembre 1916). Il s’appuya pour cela sur un « Conseil d’Administration » qu’il mit en place sous son autorité militaire (Augris, op cit). Ce conseil fonctionnait en employant des fonctionnaires civils grecs favorables à l’Entente puis des fonctionnaires civils albanais (Popescu, op cit).

Une république de fait vit le jour à Korytza du 15 mars au 1er décembre 1917. Les français présents sur place installèrent une administration complète répondant à la demande locale : l’autorité militaire pouvait seule nommer les fonctionnaires des services publics ; les forces de police et la gendarmerie mobile albanaise, chargées de maintenir l’ordre intérieur, étant placées sous l’autorité du commandant militaire français. En mars, la jeune République procéda à l’installation de douanes à ses frontières, puis à la nomination de laïcs à la direction des affaires religieuses. Des règlements divers furent adoptés : impôts sur le revenu, impôts sur le timbre, règlement judiciaire, nouvelle monnaie, timbres-poste… Un nouveau code pénal entra en vigueur. Parallèlement à cela, l’administration militaire organisa une administration sanitaire, soignant troupes et populations, avec l’ouverture d’un hôpital. (Popescu op cit).

Mais cette République avait tout pour déplaire, aux Grecs, aux Albanais écartés du pouvoir, aux Italiens. Mieux, s’inspirant de ce que les Français avaient fait en Albanie du sud-est, les Autrichiens proclamèrent en janvier 1917 l’autonomie de l’Albanie dans le giron de l’Empire, les Italiens annonçant, eux, l’indépendance totale sous le contrôle italien, en juin 1917. Le 1er décembre 1917, le commandement militaire transforma la République en « Kaza (province) autonome de Kortcha ».

En février 1918, la zone devint un territoire militaire français et le 1er mars 1918, ce territoire contrôlé par les Français s’agrandit encore, en incluant le territoire de Pogradec. C’est de là (les « Confins Albanais ») qu’est partie en septembre 1918 l’offensive victorieuse. Jusqu’au 22 mai 1920 ce territoire resta sous cette forme administrative avant d’être confié aux autorités albanaises, les Français quittant définitivement la région le 15 juin 1920 (Pospecu, op cit).

La poste dans le territoire

Timbres albanais

Les timbres d’Autriche-Hongrie, du Levant Italien, de la Turquie et même de l’Épire furent un temps en circulation en Albanie. Dans la zone de présence française, toutefois, les courriers furent affranchis avec des timbres albanais, puis avec les figurines de la République de Korytza (cf émission ci dessous).

954_001Émission de la République autonome de Korytza

Usage postal de timbres français

Des timbres français, au type « semeuse » ont aussi été utilisés. Cela concerne les 5c, 10c, 25c semeuses camées et le 15c semeuse lignée.

Pendant la cette période d’occupation française (3 ans et 6 mois), outre la poste militaire (secteur postal 508, presque exclusivement en franchise) trois bureaux de poste étaient en activité, à Korytsa, Bilisht et Pogradec. Les courriers de Korytsa sont rares, un seul courrier de Bilisht est parvenu jusqu’à nous et de Pogradec nous ne connaissons que 2 ou 3 lettres et ce fragment, seul au tarif de la lettre en 1920 : 25c.

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Fragment de lettre de Pogradec, affranchissement à 25c
Poste militaire

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Lettre au tarif international de Korytza, pour Athènes – cachet de vaguemestre d’étape du 24 mai 1920

vue en vente : https://www.delcampe.net/en_GB/collectables/stamps/france-1906-38-sower-cameo/25c-semeuse-sur-lettre-de-corytza-albanie-de-1920-pour-athenes-197504708.html

Usage postal de timbres français : affranchissements philatéliques

Les affranchissements philatéliques sont plus nombreux. Tous émanent de Korytza.

Date du 21 avril 1920 : souvenirs (pas d’adresse), l’administration est encore française

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Date du 25 mai 1920 : lettres pour Zotit (monsieur) Dhori Kotit à Korçë

Ces derniers sont les plus nombreux, malheureusement oblitérés trois jours après la fin de l’administration française et sans aucune correspondance avec les tarifs postaux.

Toutes les lettres philatéliques ci dessous sont issues de ventes entre les années 2010 et 2016. Nous en avons vu une dizaine tout au plus.

 Affranchissements à 15c 

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Affranchissement composé (lettre philatélique) :
5c +10c Semeuse, lettre pour Korytza, 25 mai 1920

vue sur http://www.worthpoint.com/worthopedia/albania-1920-french-occupation-98798539

 Affranchissements à 40c
korytza recommandee.jpgPogradec : Bureau de poste ouvert aux civils

Affranchissement composé (lettre philatélique) :
5c +10c +25c Semeuse, lettre recommandée pour Korytza, 25 mai 1920

vue en vente : http://www.stampcircuit.com/stamp-Auction/collectio-alexandre-galinos/4328184/lot-3424-france-levant-and-colonies-france

Monsieur Dhori Kotit était imprimeur, installé à Korça depuis 1908, imprimeur depuis 1911. Il fut également journaliste et publia notamment en 1922 une gazette américaine d’Albanie. Il va sans dire que ces documents restent peu communs.

Sources

Revue d’Histoire moderne, http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k56209730/f65.image.r=Les Français et la République de Kortcha

Popescu Stefan, « Les Français et la République de Kortcha. (1916-1920)», Guerres mondiales et conflits contemporains 1/2004 (n° 213) , p. 77-87
URL : http://www.cairn.info/revue-guerres-mondiales-et-conflits-contemporains-2004-1-page-77.htm.

Etienne Augris, « Korçë dans la Grande Guerre », Balkanologie [En ligne], Vol. IV, n° 2 | décembre 2000, mis en ligne le 20 juillet 2011, consulté le 01 novembre 2016. URL : http://balkanologie.revues.org/315

https://en.wikipedia.org/wiki/Autonomous_Albanian_Republic_of_Korce

Armée d’Orient… quelques courriers et images

L’exprès pour Genève du 22 février 1921

Cette lettre de la Représentation diplomatique de la République Géorgienne à Paris est classique en apparence mais elle porte les traces d’une histoire trouble, d’une République géorgienne « coincée entre la faucille et le croissant », qui devait s’écrire dans l’urgence, mais que même un recommandé en exprès ne changea pas, comme nous allons tenter de le voir.

exprès genève

Elle est adressée à Monsieur Chavichvili, représentant de la Géorgie à la Société des Nations, à Genève, le 22 février 1921 par la représentation diplomatique de la République géorgienne à Paris, située avenue Victor Hugo. La composition de l’affranchissement est accord avec l’objet : il s’agit d’une lettre pour l’étranger, affranchie à l’aide de deux semeuses camées à 25c, l’une pour le port de la lettre, l’autre pour la taxe de recommandation à 25c. Le port en exprès à 30c est matérialisé par deux semeuses lignées à 15c, ce qui correspond parfaitement au tarif de l’époque, celui qui était en place depuis le 1er mai 1910. Le cachet du bureau de poste de l’avenue Victor Hugo s’accorde en outre totalement avec l’adresse de la Représentation diplomatique, laquelle était située au 44 de cette même avenue. Nous sommes donc bien en présence d’une lettre recommandée en exprès de Paris pour Genève et ce n’est donc pas sur ce plan qu’il faut chercher ce qui rend cette lettre remarquable. Ce qui la rend remarquable, c’est l’intervalle de temps pendant lequel elle a été postée. Car, en fait, tout ici est dans la date et on va voir que l’exprès était particulièrement souhaité, mais qu’il ne servit sans doute pas.

Mais d’abord le contexte. La Géorgie, placée sous l’autorité de la Russie depuis 1801, proclama son indépendance le 26 mai 1918, à la faveur de la Révolution russe et de l’invasion allemande. Toutefois, elle dut céder à l’Empire ottoman les territoires peuplés de minorités musulmanes. Une Assemblée constituante fut réunie en 1919 et approuva une Constitution le 22 février 1921. Or, entre temps, les Allemands avaient perdu la guerre et les autorités communistes russes avaient pris l’offensive en vue de reconquérir le Caucase.

En effet, sous la pression de Staline, d’origine géorgienne, cette indépendance fut remise en cause par Lénine le 14 février 1921 lorsqu’il donna l’ordre d’envahir la Géorgie pour soutenir les «paysans et les travailleurs révolutionnaires» dans le pays. Ce qui fut fait dès le lendemain, 15 février.

Le 21 février, en marge de la Conférence de Londres qui venait de s’ouvrir pour s’occuper des affaires allemandes et du problème oriental, un accord était trouvé entre la Turquie et la Russie soviétique. Car celle-ci ne voulait pas envahir seule ce pays : elle promit à la Turquie de lui céder deux provinces qui avaient été intégrées dans l’Empire russe après la guerre russo-turque de 1877-1878, par le traité de San Stefano afin de l’inciter, par intérêt, à s’unir à elle pour soutenir l’occupation de la Géorgie. Ainsi, pendant que les troupes géorgiennes combattaient les Russes, les Turcs envahissaient le territoire le 23 février. Tbilissi fut prise le lendemain, 24 février, par les soviétiques et la République socialiste soviétique de Géorgie fut proclamée le 25 février 1921. Toutes ces tractations ont par ailleurs été confirmées en octobre de la même année au traité de Kars. Et entre la proclamation de la Constitution et la chute du régime, il s’était donc passé trois jours.

Revenons en donc à notre lettre adressée au représentant de la Géorgie à Genève. Devait il annoncer la nouvelle Constitution ? Rechercher le soutien des puissances occidentales contre les soviets et les turcs en avertissant ces mêmes puissances de la menace qui pesait sur la Géorgie ? Annoncer l’invasion des turcs qui ne se limitaient donc pas à renégocier le traité de Sèvres à Londres mais agissaient bel et bien. Il s’est passé trois jours pendant lesquels le gouvernement géorgien a tenté, en vain, de rechercher l’appui de l’occident pour s’opposer et à la Russie soviétique et à la Turquie. Et c’est dans l’urgence de ces trois jours que fut postée notre lettre. Ce qui justifiait largement cet envoi recommandé international en exprès, mais même s’il fût averti assez tôt, le représentant géorgien ne put infléchir le cours de l’histoire.

Surcharge « pro patria »

 Les essais de surcharges, 1915 à 1917

Ces essais de surcharges ont été faits sur bristolpropatria La surcharge existe en bleue, en noir, en rouge. Il s’agit d’un projet non émis pour les Orphelins.

Mise en vente en janvier 2013 : 2000 euros

Destination Japon

LSE Japon 02:03:17

En mars 1917 cette lettre part pour l’Ambassade de France à Londres. Malheureusement le destinataire est déjà au Japon. La lettre va alors suivre le plus simplement du monde, et parvenir à son destinataire deux mois jour pour jour après avoir été postée.