Grèce et en mer Égée : Castellorizo et autres bureaux grecs

CASTELLORIZO

Brève histoire du territoire

Mégiste durant l’antiquité grecque, portant des traces de constructions mycéniennes, l’île a pris sous l’empire byzantin le nom de Kastellorizon lequel nom qui sera ensuite déformé dans toutes les autres déclinaisons durant les différentes occupations.

En 1306, l’île fut prise par les chevaliers de l’ordre de Saint-Jean de Jérusalem et intégrée à leurs possessions de Rhodes, île située à 110 kilomètres. L’île était utilisée comme lieu d’exil et de détention : il faut dire que les cotes d’Asie mineure (actuelle Turquie) ne sont qu’à 5 kilomètres.

Après avoir été prise en 1440 par l’armée du sultan d’Égypte, Kastelórizo est successivement contrôlée par les Catalans en 1461, par le Royaume de Naples en 1470, par les ottomans en 1480, de nouveau par le Royaume de Naples en 1498 et par les Espagnols en 1512.

En 1635, la République de Venise prend possession de l’île qu’elle rebaptise Castellorosso par déformation du nom originel. Elle est reprise par l’empire ottoman en 1686.

À partir de 1821, l’île est administrée par la Grèce lors de sa guerre d’indépendance mais l’île est finalement récupérée par l’empire ottoman en 1833.

Entre 1913 et 1915, Kastelórizo acquiert l’autonomie avant de subir différentes périodes d’occupation et de changer de nouveau de mains.

La France tout d’abord a occupé le territoire de 1915 à 1920 (24 décembre 1915 au 21 août 1920). C’est cette période qui nous intéresse plus particulièrement. Castellorizo étant en fait une des « échelles » (escales) du Levant, permettant un contrôle politique et diplomatique de la zone.

A la suite de cette période, l’île repassa sous contrôle de l’Italie qui l’intégra dans ses possessions du Dodécanèse avec les autres îles de la mer Egée (Isole Italiane dell’Egeo) le 11 juillet 1922 et la renomma Castelorosso. Après une occupation anglaise en 1944-1945 à la suite de la capitulation de l’Italie, l’île revint finalement à la Grèce mais elle resta sous administration britannique jusqu’au 15 septembre 1947 puis sous administration grecque jusqu’au 22 mars 1948, date de l’union (énosis) effective. La population  de l’île, estimée à  3000 vers 1913 au moment de la guerre balkanique était alors tombée à environ 250 personnes, la plupart des habitants ayant fui l’unique village et son petit port.

En 1922, les italiens surchargèrent leurs propres timbres avec la mention CASTELROSSO apposée à l’horizontale. En 1923, ils imprimèrent une série de cinq timbres représentant une carte de l’île et le drapeau italien. L’île étant devenue une colonie italienne en 1924, ils surchargèrent de nouveau des timbres italiens avec la mention CASTELROSSO apposée en diagonale puis la série Ferrucci en 1930 (surcharge horizontale) et la série Garibaldi de 1932 (surcharge horizontale). En tout, 39 timbres furent émis sous l’occupation italienne.

Histoire philatélique

Son histoire philatélique est liée à celle des bureaux de postes français du Levant établis à partir des années 1830. La poste, dans ces années-là, faisait office d’ambassadeur français dans ces pays. Profitant de la désorganisation de l’Empire Ottoman, le gouvernement français y avait établi un très grand nombre de bureaux de poste que l’on appelait alors Échelles du Levant, ce qui signifie « escales ».

Pendant 5 ans, jusqu’en juin 1920, les marins, usagers réguliers de ce bureau, utilisèrent simplement des timbres de France et du Levant Français. Les uns provenaient des bureaux de poste des navires, les autres, des bureaux de poste de Rhodes, île voisine utilisant également des timbres de France. Rien ne permet d’identifier les timbres ou les lettres venant de cette ile que les cachets utilisés à Castellorizo .

Le premier en date est celui de la 1ère Armée Navale  » OCCUPATION FRANÇAISE, 1ère Armée Navale , 3ème escadre  » qui,  basée à Port Said, opéra le débarquement. Il n’a servi que quelque mois.

castellorizo cachet 1ere armée.pngTrès rapidement il céda la place au cachet du  » CORPS D’OCCUPATION  » (vu en août 1916)

castellorizo cachet 2Ce cachet est rare mais il est le plus connu, car il fut utilisé pour oblitérer, par complaisance, de très nombreuses pièces du Levant français (l’encre est plus vive que celle du bureau local).

Pendant ces cinq années tout le courrier fut oblitéré avec ce cachet « CORPS D’OCCUPATION » frappé en noir, puis est dirigé sur la base de Port-Saïd qui y appose son cachet du bureau français, parfois en double sur le timbre.

castellorizo cachet 1Cachet de Castellorizo Corps d’occupation sur document, annulant le 5 c semeuse. L’annulation est aussi et surtout faite par le cachet local de Castellorizo, libellé en grec, comme il se doit, soit ici Καστελλόριζον Μεγίστη (Kastellorizon Megistè) daté du 15 décembre 1915.

En juin 1920,  le lieutenant de vaisseau TERME, gouverneur militaire de l’ile, commandait depuis le 1er janvier 1920 la base de Castellorizo rattachée à Beyrouth. C’est lui qui décida de faire surcharger les timbres de France et du Levant. Le vaguemestre a alors réalisé des surcharges spéciales créées et utilisées sur les trois émissions de l’été 1920. Ces surcharges n’ont servi qu’une année.

Ces timbres français sont oblitérés avec le même cachet mais l’encre est violette.

castellorizo fragmentAu début de 1921, les troupes se retirèrent et il ne demeura dans l’île que des services administratifs. Le premier cachet fut à nouveau utilisé avec une encre violette  « OCCUPATION FRANÇAISE  » ce cachet ne comportait pas les mentions  » 1ère Armée Navale , 3ème escadre « 

castellorizo feuilleFeuille « commémorative » de l’occupation française en date du 28 février 1921, date de retrait des militaires, sur timbres du Levant, seuls disponibles sur l’île entre août 1920 et février 1921.
(http://www.delcampe.net/page/item/id,83182421,var,Castellorizo-Tmbres-du-Levant-Document-du-28-0221-Occupetion-francaise-sur-timbres-du-Levant-RARE,language,F.html)

C’est également ce cachet de commémoration que l’on trouve sur cet exemplaire lequel présente en outre une surcharge inversée :

castellorizo nouveau.png

Semeuse 25c bleu à Castellorizo

Le vaguemestre chargé des opérations philatéliques était à bord d’un navire français, « la Provence » et c’est là que trois surcharges virent le jour, dont deux seulement concernèrent le 25c bleu : ONF Castellorizo (Occupation Navale Française) puis O.F. Castellorizo (Occupation Française) ; la première BNF Castellorizo ne se trouvant que sur timbres du Levant.

Première émission : 19 juin 1920

Cette émission a été épuisée en deux jours. Elle n’a concerné que les timbres du Levant disponibles sur l’île à ce moment, soit 13 valeurs.

Deuxième émission : 22 juin 1920

Timbres du Levant français et de France surchargés « ONF Castellorizo »

Cette surcharge locale ONF pour Occupation Navale Française a été imprimée en typographie sur des panneaux de 25 timbres dépourvus de leurs marges, par blocs de dix. Il n’y a pas de millésime.

Longueur de O.N.F. 13 ¾ mm.
Longueur de Castellorizo 17 ¼ mm.
Hauteur totale de la surcharge 0,7mm.

Castellorizo 31

25 c type I A
surcharge carmin
papier GC

castellorizo bloc de 4

Bloc de 4 exemplaires oblitérés du grand cachet de Castellorizo frappé à l’encre violette

Il existe des variétés sans point sur le « i » de Castellorizo et « F » de O.N.F. cassé.
Il existe aussi une surcharge renversée.

Troisième émission du 26 août 1920

Le 10 août 1920, à la suite de la signature du traité de Sèvre, les iles du Dodécanèse sont placées sous administration italienne. Pour autant, le lieutenant de vaisseau en charge de l’île fit réaliser une troisième émission sur un petit stock de figurines parvenues par le navire « le Provence », à bord de celui-ci.

Il s’agit de timbres de France et du Levant surchargés OF CASTELLORIZO pour Occupation Française.
La surcharge est verticale et descendante sur les petits formats (Semeuses) et horizontale sur les grands formats (Merson). Le cachet ayant servi à cette surcharge fut détruit le soir même du 26 août 1920, ce qui fait de cette émission une des plus brèves de l’histoire philatélique de France, marquée par de faibles tirages : les 4 Semeuses concernées ont chacune été tirées à 500 exemplaires, les 6 Mersons à 200 exemplaires, les 5 petits formats du Levant en nombres inconnus, mais sûrement faibles eux aussi.

                                                  Castellorizo 4025c type IA, 1921 (tirage 500)

Millésime : tirage estimé 10

Castellorizo, millésime 9Millésime 9 (1919)

Quatrième émission :  « occupation française Castellorizo » sur 3 lignes (non émis)

L’impression de cette surcharge qui devait être la 4ème émission avait commencé lorsque l’île fut remise aux autorités italiennes il subsiste quelques essais sur timbres du Levant). Le 25c bleu a semble-t-il reçu cette surcharge : on connait quelques lettres de complaisance oblitérées du bureau philatélique du Levant à Smyrne.

Usages suivant le tarif unique du 1er mai 1910 au 31 mars 1921

Les tarifs en usage à Castellorizo suivent la même tarification que le Levant dont la mention se trouve dans les bulletins officiels des Postes (BOP) 1920-12  :

« Sont  bénéficiaires du tarif intérieur français hors franchise postale, les militaires français de l’armée d’Orient, les membres de la famille des officiers installés sur place. Tous les autres cas sont passibles des taxes internationales ou locales (correspondance France vers militaires, ou correspondances civiles). »

Tarif levantComme on le voit, le tarif international appliqué est celui de 1879, encore en vigueur : 25 centimes la lettre simple, 10 centimes la carte postale et 5 centimes l’imprimé du premier échelon. Ce tarif est resté en vigueur jusqu’en novembre 1920 quand la France, voulant appliquer les nouvelles règles de l’UPU, a augmenté ses taxes sur la base de 50 centimes-or pour le port de la lettre, convertible en monnaie locale.

Toutefois, il est difficile d’établir une vérité, en effet bien des affranchissements connus  étant des plis philatéliques, surtout pour les valeurs élevées ou les timbres de Poste par Avion

Autres bureaux en service en 1907 ou après cette date

Cavalle – 1914

Bureau de distribution, ouvert en janvier 1874, fut fermé en août 1914

Dédéagh – 1915

Bureau de distribution fut ouvert le 1er janvier 1874 et fermé le 16 Avril 1915

Candie – La Canée – Rethymno – 1913

Bureaux de Crète. Six bureaux de distribution ont été ouverts en 1897 à La Canée et à Candie ainsi qu’à Rethymno, Hierapetra, San Nicolo et Sitia. Hierapetra, San Nicolo et Sitia ont fermé en 1899, Les trois autres en 1913 après l’intégration définitive de l’île avec la Grèce, dont l’union avait été prononcée en 1908.

Les bureaux suivants n’étaient plus en service au moment de l’émission du 25c bleu :

Enos : ouvert en janvier 1874, fut fermé en avril 1875
Lagos devenu Port-Lagos : Bureau de Distribution a fonctionné à Lagos à deux reprises : de janvier 1874 à avril 1875 sous le nom de Lagos et de 1880 à 1898 sous le nom de Port-Lagos
Métélin (Mytilène) : bureau de distribution, ouvert en septembre 1852, fut fermé en avril 1872
Volo (ouvert de 1879 à 1881)

hors collection, vu sur site : semeuse.com

Fragment la canée

Rhodes – 1924

Bureau de Distribution, ouvert en septembre 1852, fonctionna jusqu’à septembre 1887. Fermé, puis ouvert de nouveau en janvier 1896 il devint Bureau de Recette vers 1911-1912, il fut fermé définitivement en septembre 1924

Salonique – 1914

Deux bureaux, l’un,  bureau de distribution, ouvert à la fin de 1856 devenu en bureau de recette le 1er janvier 1880, l’autre bureau de recette, annexe du bureau principal, fut ouvert en 1889 ; tous les deux fermés en 1914

Salonique

Ouvert de novembre 1857 à 1914 Bureau de distribution, il fut converti en bureau de recette le 1 janvier 1880

Salonique-quartier-franc

Ouvert de 1889 à 1914 Bureau de recette, annexe de la recette principale

Vathy – 1914

Bureau de distribution, ouvert en 1893, fermé en août 1914