Chromo et découpis

Au début du XXème siècle certains éditeurs de cartes ont diffusé des cartes blanches, sur carton épais qui pouvaient servir de support à des dessins ou des collages. De nombreuses cartes postales ont circulé au début du XXe siècle, montrant des paysages réalisés avec de l’aquarelle et des timbres découpés et collés. Ce sont des découpis de timbres sur carte, représentant  des paysages, des créations pour accompagner une fête, des vœux … ce sont souvent des fleurs, parfois des personnages… Chaque carte est unique, cela va de soi.

maison au bord de l’eau, 25c semeuse et 15 c sage

moulin et pont, 25 c semeuseInfirmière (vu sur https://www.cparama.com/forum/decoupis-t9110.html)

Et pour finir une farandole de semeuses et aquarelle, en Provence :

decoupis danse semeuses

École d’aviation de Villesauvage

En 1909 fut ouvert un centre d’aviation à Villesauvage qui devint ensuite le Centre d’aviation militaire d’Etampes – Montdésir. Initialement, le site regroupait quatre écoles d’aviation civile de constructeurs. La première école de pilotage construite sur le site de « Villesauvage » fut fondée en mars – avril 1910 par Louis Blériot. En juin 1910, les écoles des frères Farman s’installèrent sur le site puis vers 1912 l’école Deperdussin. En 1914, les constructeurs Blériot et Farman se déplacèrent partiellement à Toussus-le-Noble et à Buc.

En 1915, le site se trouva militarisé après réquisition des lieux par le gouvernement français pour y installer une école pour l’armée belge. Des pilotes britanniques et américains y firent aussi leurs premiers vols. La France récupéra les installations en juin 1917 : l’école militaire belge fut transférée à Viry-Châtillon (Port-Aviation ; premier aéroport au monde) à partir du 1er avril 1918. Quant aux troupes américaines, elles construisirent le centre d’entraînement de Paray-Vieille-Poste-Orly, toujours en 1918.

L’école Blériot, était localisée à 6 kilomètres au sud est d’Etampes, sur la route nationale d’Orléans (RN 20), l’école Farman, en face de l’école Blériot, l’école Deperdussin, à 3 kilomètres à l’ouest, sur la route de Rambouillet.

Edition de 1913-1914

Plan des installations en 1914.

Le camp bénéficiait d’un cachet propre : VILLESAUVAGE AVIATION / SEINE ET OISE

30 septembre 1922  pour Bouray (Seine et Oise), arrivée verso le 1er octobre

villesauvage 1922.png.jpg

lettre simple affranchie à 25 c avec vignette Guynemer

En mai 1920, l’Administration des Postes imprima une vignette à l’effigie de Guynemer pour être apposée sur le courrier par avion de la ligne Paris-Londres afin de le distinguer du courrier normal. Cette vignette fut surchargée le 10 octobre 1920 pour le Meeting aéronautique de Buc.

Elle fut remplacée en février 1923 par l’étiquette « PAR AVION », ces étiquettes devenant obligatoires lors du congrès de l’UPU de Londres de 1929.

Premier vol postal officiel : Jarville – Lunéville, 31 juillet 1912

Une fois n’est pas coutume, laissons tranquille le 25c bleu.

Le mercredi 31 juillet 1912, eut lieu entre Jarville et Lunéville, aux environs de Nancy, un essai de liaison aérienne postale en France. Cette mission avait été confiée au lieutenant Nicaud, assisté du mécanicien Million. Il s’agissait de transporter quelques 15000 lettres réparties dans trois grands sacs postaux, le tout pour un poids d’environ 50 kgs en effectuant un trajet aller-retour de Jarville à Lunéville (27km), en passant par Nancy, en 56 minutes, remise du courrier à l’administration postale comprise :

Carte postale du 31 juillet 1912, Nancy

030_001.jpg

Cette expérience qui préfigurait un véritable service postal aérien dans l’ensemble de l’Hexagone, s’était faite au profit de l’aviation militaire, à qui était destiné le fruit des ventes des timbres postaux spécialement édités pour l’occasion.

voir page complète : la naissance du service postal aérien

Mise à jour de la page sur la naissance du service postal aérien

Mise à jour de la page sur la naissance du service postal aérien, avec notamment tous les tarifs pour l’international que l’on peut rencontrer durant la période normale d’utilisation de la semeuse 25 c, c’est à dire jusqu’en juin 1927.

Nous n’avons pas encore beaucoup de lettres à présenter, mais au moins, les tarifs étant affichés, cela permet une recherche plus rapide.

Bibliographie

Alexandre, Barbey, Brun, Desarnaud, Joany  les tarifs postaux français (1627 – 1969) ;  ed Brun et fils, 1989.

Croix Rouge, Dardanelles, Charles Roux & Asturias : l’aventure d’un navire hôpital

Fouinant toujours à droite et à gauche, toujours à la recherche de semeuses sur des courriers témoignant de la petite ou de la grande histoire, j’ai vu cette enveloppe :

LSE-Croix-rouge-dardanelles.png

Il s’agit d’une lettre de Paris, boulevard des Capucines pour la Suisse passée par le bureau de contrôle de Pontarlier. Sur le pli, on remarque la présence d’une vignette de bienfaisance de la Croix Rouge, intitulée « Dardanelles ».

Par ailleurs, il y a quelques temps, j’ai mis la main sur ce carnet de timbres de bienfaisance au profit de la Croix Rouge émis dans le but de financer l’affrètement d’un navire hôpital pour les blessés des Dardanelles en 1915. Le site de l’Arc en Ciel, (site de l’Association Française d’Erinnophilie) nous en donne le descriptif.

Numériser

« Carnet de 20 timbres (2 planches de 10 – 2 x 5), sous couverture RH 157 x 115, polychrome, représentant le navire-hôpital « Charles-Roux« . Le navire est peint en blanc avec une large bande verte. Les cheminées sont rouges. Texte en haut : « Croix Rouge française » (en rouge) ;  » Expédition des Dardanelles » (en noir). « Carnet de 20 timbres. Prix 1 franc » (en rouge). En bas à gauche : « Société française de Secours aux Blessés militaires » ; à droite « Siège central Paris, 21 rue François-Ier » (en noir). Cadre tricolore tout autour. A l’intérieur de la couverture, à gauche, texte en noir intitulé « Pour les blessés des Dardanelles« , appel pour la réalisation du navire-hôpital. A droite et au verso, reproduction d’un article de Pierre Loti : « Pour les grands blessés d’Orient » et extrait du « Figaro » du 13 juillet 1915. »

Jusqu’à présent, et depuis mai 1912 les carnets de la Croix rouge représentaient en couverture, soit en sépia soit en couleur un zouave blessé au bras, soigné par une infirmière dans un camp au Maroc. C’est le cas sur cette reproduction à l’occasion de la nouvelle année 1913.

hors collection : carnet 1912

carnet-couverture-zouave

Si on revient au carnet orné d’un bateau, il contient des timbres qui représentent ce même camp de la Croix Rouge au Maroc. Ce qui est loin des Dardanelles, mais on n’en voudra pas à la Croix Rouge de ce tour de passe passe pour la bonne cause.

Zouave-blesse

C’est la vignette de l’enveloppe ci dessus. Mon attention, alors s’est portée sur le bateau représenté. Pourquoi celui-ci plutôt qu’un autre ? Et d’ailleurs pourquoi un navire plutôt que l’habituel zouave ?

Premier navire à turbines français

Ce bateau a été le Charles Roux. Le Charles Roux fut le premier navire à turbines français, à triples hélices. Il était peint en blanc avec une large bande verte. Les cheminées étaient rouges. Construit à Saint-Nazaire, lancé le 25 septembre 1907, il a quitté ce port le 4 juin 1908 pour Marseille.

Construction du Jules Charles Roux, chantiers navals de Saint Nazaire

Charles-Roux-saint-nazaire.png

Après divers réglages, après qu’on a rehaussé les cheminées et repeint la coque en noir, il prit son service sur les lignes d’Afrique du Nord entre Alger et Marseille pour la Compagnie Générale Transatlantique.

Cachet du navire, Compagnie Générale Transatlantique 8 août 1909

Cachet-charles-roux.png

La guerre lui offrit une tout autre carrière. Il fut en effet réquisitionné et, de mars à mai 1915, le « Charles Roux » fut utilisé comme transport du Corps Expéditionnaire aux Dardanelles où il devint le premier navire français à débarquer des troupes.

hors collection : le Charles Roux, non cité mais facilement reconnaissable
Charles-rous-debarquant-les-troupes

Hôpital flottant

De juillet à août 1915, il fut transformé en navire hôpital aux chantiers de Provence de Port de Bouc. Affrété par la Croix Rouge, il servit d’hôpital chirurgical flottant à Moudros, non sans qu’une collecte de fonds ait été nécessaire pour financer cette opération. D’où les fameux carnets sans doute.

Un navire hôpital s’il voulait être reconnu comme non belligérant devait se conformer à certaines dispositions de la convention de Genève en arborant de grandes croix rouges sur une coque généralement peinte en blanc. De plus, on pouvait distinguer les navires-hôpitaux civils (coque blanche ornée de croix rouges, avec une large bande rouge) et les navires hôpitaux militaires (coque blanche ornée de croix rouges, avec une large bande verte).

C’est ce que nous montre cet autre carnet de timbre au profit de la croix rouge :

Charles-roux-bande-rouge

Le passage d’une couverture de carnet à l’autre semble bien témoigner de la volonté d’afficher le statut civil ou militaire, or l’hôpital flottant à Moudros était militaire comme en témoignent les griffes de l’hôpital chirurgical flottant du C.E.O.

Griffe de l’hôpital chirurgical flottant du Corps Expéditionnaire d’Orient

hopital-flottant-nice.png

Mention écrite de l’hôpital chirurgical flottant Charles Roux
du CEO avec cachet Trésor et Postes SP 196564_001

Asturias et Charles Roux : deux navires hôpitaux dans la guerre

Pour autant ceci ne garantissait pas complètement le navire. En effet un navire-hôpital qui serait utilisé, même partiellement, dans des opérations militaires (transport de troupes, de matériel etc.) perdrait son statut de non-belligérant. C’est ce que nous rappelle l’histoire de l’Asturias.

Hors collection : carte postale colorisée de l’Asturias, vers 1912
asturias.png

L’Asturias, lancé lui aussi en 1907, à Southampton, avait été réquisitionné pour le transports de blessés britanniques de France du Havre vers Southampton, dès août 1914 par la Royal Navy. En 1915, il rapatria les blessés de Méditerranée pour la campagne franco-britannique des Dardanelles et de Salonique mais aussi d’Égypte.

Hors collection : l’Asturias repeint aux couleurs
d’un navire hôpital orné de plusieurs croix rouges

Asturias repeint

Le 20 mars 1917, alors que le bateau avait débarqué à sa dernière escale d’Avonmouth en Cornouailles les blessés d’Orient et qu’il faisait route vers son port d’attache, avec à son bord les membres d’équipage et quelques médecins et infirmières, il fut touché par deux torpilles lancées par un sous marin allemand, tuant le capitaine, 1 infirmière et 12 aides soignantes. L’Asturias s’échoua finalement sur une côte du Devon où il demeura un temps avant d’être remorqué sur ordre de l’Amirauté jusqu’à Plymouth pour en faire un dépôt de munitions jusqu’à la fin de la guerre.

L’histoire n’en resta pas là. Le naufrage provoqua une vague d’indignation, à laquelle la marine allemande répondit que l’Asturias ne transportait aucun blessé au moment de la rencontre et qu’il n’était donc plus non-belligérant.

La liste des Navires hôpitaux britanniques détruits est longue : pas moins de 16 navires en principe non belligérants furent ainsi touchés, avec ou sans autorisation, faisant pas moins de 650 victimes non combattantes. C’est là, dans cette indignation, sans doute, qu’il faut chercher l’origine du projet du dessinateur de ce timbre bien connu des philatélistes.

Infirmieer-tipbre

Ce timbre de 15 centimes + 5 centimes au profit de la Croix-Rouge française est unique dans son grand format horizontal. Dans un décor théâtral, au travers d’une colonnade on distingue sur la droite de la gravure, une infirmière passant devant une ambulance (dans un lazaret non identifié) et sur la gauche un navire hôpital que l’on dit être l’Asturia (sic!).

Il a déjà été remarqué en 2011 dans Timbres magazine, qu’il ne pouvait pas s’agir de l’Asturias, mais sans pour autant identifier le navire. En effet l’Asturias n’était doté que d’une seule cheminée, ce que chacun peut vérifier aisément. Et d’ailleurs, pourquoi avoir voulu prendre l’Asturias plus qu’un autre comme modèle ? Pourquoi avoir voulu retenir un navire hors service au moment de l’émission de ce timbre ? On serait plus prudent en faisant le pari de l’allégorie du navire hôpital. Et cette allégorie, en fait, on s’en doute, est inspirée directement du Charles Roux déjà représenté sur tous les carnets au profit de la croix rouge.

Ceci donnant tout son sens aux vignettes et aux couvertures des carnets de vignettes au profit de la Croix Rouge, avant que les timbres poste eux aussi au profit de la Croix Rouge ne soient émis. Il fallait une certaine continuité.

Le Charles Roux et l’Asturias après la guerre

A partir du 4 décembre 1916, le Charles Roux fut utilisé comme croiseur auxiliaire pour l’armée d’orient jusqu’au 16 décembre 1918. En 1921, il reprit du service pour la CGT, toujours en Méditerranée, puis subit des aménagements de juillet 1929 à mars 1930 (cheminées raccourcies, turbines changées, puissance réduite). Au début de 1935, la CGT l’utilisa sur la ligne Casablanca Bordeaux, avant de l’envoyer au Havre où il devait assurer des liaisons sur la mer Baltique. Le projet toutefois n’aboutit pas et le navire fut désarmé à Dunkerque à partir de décembre 1936 et durant toute l’année 1937.

L’Asturias quant à lui fut renfloué en 1921, envoyé à Belfast où il fut transformé en 1922 et il reprit du service comme navire de croisière, en mer du Nord, en Atlantique, en Méditerranée sous le nom d’Arcadian II. Les voyages de luxe et les croisières ayant été très affectés par la crise des années 1930, l’Asturias – Arcadian II est resté à quai à Southampton de 1930 à 1933, date à laquelle il fut démoli.

Un second navire de ce nom, l’Asturias II, fut mis à flot en 1925. Il assurait la liaison avec l’Amérique du Sud. Ce navire est celui des affiches de la Royal Mail. Il fut réquisitionné à son tour pendant la Seconde Guerre mondiale et transformé en croiseur auxiliaire. Torpillé en 1943, il fut abandonné jusqu’en 1945. Renfloué, réparé à Belfast, il reprit du service dès 1946 vers l’Australie et ce jusqu’en 1952. A cette date il fut converti en transporteur de troupes jusqu’en 1957 quant il fut vendu pour être démoli.

asturiasII-affiche

Certaines pièces de teck de l’Asturias II furent adaptées en mobilier de jardin par Hughes et Bolckow et on peut en voir encore beaucoup aujourd’hui en Angleterre. Toujours pour l’anecdote, avant d’être totalement démonté, l’Asturias II fut utilisé à bâbord comme décor du film A night to remember (en français : Atlantique, Latitude 41°) pour représenter le Titanic dans les scènes de vie alors que les ouvriers officiaient à tribord. Et la démolition n’a été achevée qu’une fois le tournage terminé.

CHARLES ROUX Navire hôpital (1916 – 1917)

charlesroux

Chantier :

Chantiers et Ateliers de Penhoët, Saint Nazaire
Commencé : 1906
Mis à flot : 1907
Livré : en juin 1908
Entrée en flotte : retardé pour réglages et modifications aux machines, en 1909 ligne d’Afrique du Nord. C’est le premier navire à turbines français.
En service (MN) : 04.02.1916
Retiré : 14.03.1917
Caractéristiques : 4 104 tjb ; 10 000 cv ; 3 hélices ; 116,32 x 13,9 m ; 20 nds ; 1 049 tpl

Observations :

Paquebot de la Cie Générale Transatlantique (CGT)
1914 – 1916 : transport de troupes
03.1915 – 05.1915 : utilisé comme transport de troupes puis transformé en navire-hôpital.
Sert d’hôpital flottant à Moudros mais n’est pas utilisé pour transporter des blessés.
03.1916 : rendu à la Transat et placé en réserve.
12.1916 : réquisitionné de nouveau et utilisé comme transport de troupes puis comme croiseur auxiliaire jusqu’en décembre 1918.
04.12.1916 au 14.03.1917 : réquisitionné
1916 – 1917 : navire hôpital
1917 – 1918 : transport de troupes
1919 : rayé
06.1921 : reprend son service à la Transat, après une longue remise en état.
1935 : désarmé
10.1936 : vendu pour démolition
1937 : démoli à Dunkerque